Soirée cauchemardesque

Ma mère s’est récemment acheté une cabane à pêche pour la pêche blanche sur le Saguenay. J’adore y aller puisque pêcher est un de mes hobby. Depuis quelques jours, à cause du redoux, nous ne pouvons plus descendre à la cabane en voiture, interdiction de la ville, il faut y aller à pied et laisser notre voiture à la halte routière. Le chemin à parcourir représente environ 5 minutes, mais aux grands vents, ce n’est pas de tout repos. Mais pour nous, pêcheurs invétérés, rien ne nous arrête !

Mais samedi, notre journée de pêche à failli se terminer en drame.

Il était environ 17h, donc il faisait noir. Mon père, Chéri et moi décidons de partir. En sortant de la cabane de ma mère, normalement, nous emprunterions la rue ainsi que le chemin principal, mais mon père dit « Ben non, faites moi confiance, suivez-moi ». Je dois expliquer ici que mon père est un véritable homme des bois. Il pêche, il chasse, il bricole, il construit des cabanes, pour moi il est indestructible et a toujours raison (enfin la plupart du temps). Je le suis non sans lui répliquer « c’est ça ‘pa, si tu te noies, on se noie aussi ! » tout en agrippant le bras de Chéri.

1 seconde plus tard, SHLOUK ! la glace cède sous mon poids. Je me retrouve la jambe gauche dans l’eau glacée, jusqu’à la taille. Chéri me tient toujours par le bras et il crie mon nom. Je me souviens de l’avoir regardé dans les yeux tout en criant d’effroi. Je ne voulais pas mourir sous la glace. Chéri me tire deux fois de toutes ces forces. À la deuxième, il parvient à me sortir de l’eau. Je pleure, je shake. J’ai eu peur comme jamais. On me fait entrer dans la cabane d’un couple super gentil . Ils ont un 4 roues et me ramène à ma voiture. Pendant ce temps, Chéri emprunte le chemin principal et viens me rejoindre à l’auto.

Mais en arrivant dans l’auto, Chéri me retrouve paniquée. J’ai peur, j’ai vraiment eu peur. Mais Chéri à une autre mauvaise nouvelle à m’apprendre. Il dit qu’en marchant vers la voiture, il a entendu un homme crier « Au secours ». Sa voix était paniquée, rauque. Il criait vraiment fort. Je me remets à pleurer. Et si c’était mon père ou le chum de ma mère ??? Chéri ne pouvait pas aller au secours de l’homme. S’il avait piqué à travers champs, il aurait pu lui aussi tomber à l’eau.

Je pleure de plus belle. SVP mon Dieu, faites que la personne s’en sorte vivante.

J’aperçois deux silhouettes qui s’approchent de ma voiture. C’est ma mère et son chum. Je sors de l’auto. « Maman, où est papa ??? ». Elle ne comprend pas, elle dit : « Mais il est avec toi non ? ». Je pleure, je crie. « NON ! ». Le chum de ma mère, fort en gestion de crise (merci armée canadienne !) retourne sur la glace pour aller voir. Il croise un 4 roues, celui qui m’a ramené. Le monsieur nous apprends que c’est mon père qui est tombé dans l’eau glacée, et qu’il avait vraiment failli y rester. Il avait de l’eau jusqu’au cou. La femme du Monsieur, en essayant de venir en secours à mon père à elle aussi tombé à l’eau. Le monsieur à donc dû rescaper sa femme et ensuite mon père. Mon père avait de l’eau jusqu’au cou, 1 seconde de plus et il y restait. Nous n’aurions probablement jamais retrouvé son corps.

J’ai eu tellement peur que s’est très difficile à expliquer. Présentement, j’en ai encore les yeux pleins d’eau. Je fais de l’insomnie, et quand je réussis à dormir, je fais des cauchemars.

J’aurais pu perdre mon père, mon père invincible. J’aurais pu mourir aussi.

Bien sûr, la ville se délie de ses responsabilités en mettant une petite pancarte à l’entrée indiquant qu’on y pénètre à nos risques. Mais pourquoi ne pas interdire l’accès tout court ? Dans la même journée, mon père, moi, la femme du monsieur, et j’ai su aussi qu’une dame de 70 ans avait callé ; 4 personnes auraient pu trouver la mort samedi, et ce, dans un seul site de pêche blanche à La Baie. (On en a trois)

Qu’attendent-ils ?

En attendant, j’essaie de dormir, de panser mes plaies invisibles…